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Cités d’hier et d’aujourd’hui


Cités d’hier et d’aujourd’hui…

« La banlieue c’est la tèce, non ? C’est un peu la zone. » nous explique Paul, 15 ans.

La « tèce » c’est la cité, ou plus exactement l’apocope du verlan « téci ». Dans le langage des « jeunes de banlieue », ce terme désigne des quartiers d’habitation, éloignés des grandes villes, ou des centres de la vie économique et sociale d’une entité urbaine. Ces espaces sont parfois qualifiés de « zone » (toujours au singulier) pour signifier leur caractère misérable, la situation de grande précarité dans laquelle se trouve ceux qui y vivent. La « Zone » est alors un territoire isolé, aux frontières officieuses parfois très marquées. Contrairement à la zone militaire non aedificandi (interdite de construction) qui s’étendait autrefois au-delà des anciennes fortifications de la capitale, et dont elle tire son nom, elle n’est plus nécessairement hors de la ville, mais elle ne lui appartient pas vraiment non plus. Il n’est plus illégal de s’y installer et les bidonvilles y sont beaucoup moins fréquents qu’autrefois, mais elle reste pour certains une « zone de non-droit », un territoire soumis à d’autres règles, qui se maintient ou est maintenu à l’écart.

La cité, ce n’est pourtant pas toujours « la Zone ». Le terme est en fait assez imprécis. On l’emploie pour désigner des ensembles urbains très divers.

A l’origine, dans l’Antiquité, il ne s’agissait d’ailleurs même pas d’ensembles urbains. La Civitas romaine désigne d’abord, comme la Polis grecque, une communauté d’hommes libres – de citoyens (civēs) – et les droits associés à leur statut. Elle n’en vient qu’ensuite, par métonymie, à qualifier le territoire qu’ils habitent.   

Plus tard, on assiste à un retournement complet, et c’est la Cité devenue ville qui peut, par métonymie, désigner ses habitants.

Aujourd’hui, la cité n’est plus que rarement ville. Elle l’est encore par la survivance de dénominations anciennes et grâce à la création plus récente de surnoms formés sur le même modèle. Le terme de « cité » vient alors souligner l’héritage historique de la ville concernée : la cité des Phocéens (Marseille) est fière de ses origines grecques, la cité des papes (Avignon) n’oublie pas qu’elle a un temps hébergé le siège de la papauté, et la cité du Lion (Belfort) s’enorgueillit de son passé guerrier ; à l’inverse, le préfet de la Loire-Atlantique voudrait bien occulter le fait que la cité des ducs (Nantes) a été pendant des siècles la capitale du duché de Bretagne.  

Dans tous ces exemples, le nom de « cité » confère un caractère prestigieux à la ville. Seules les plus grandes ou les plus anciennes ont d’ailleurs droit à ce « titre de noblesse ».

Il y a sur ce point quelques similitudes avec l’usage anglo-américain qui, dans le langage courant, fait des grandes villes des « Cities » fussent-elles de simples « towns ». 

En France, le terme de « cité » désigne surtout, depuis le XXe siècle, une partie de la ville formant une unité relative. Il peut s’agir de la vieille-ville d’une grande municipalité comme de cités des sciences, de cités universitaires, de cités-jardins ou d’anciennes cités ouvrières.  On pense cependant plus souvent aujourd’hui aux cités-HLM reléguées à la périphérie des grandes villes.

On le constate, la « tèce » est une cité particulière. « Les cités » ne sont donc pas toutes les cités, et le pronom défini crée ici une confusion dont on se passerait bien. L’usage se charge heureusement de pallier les imprécisions de la langue. Sans doute avions-nous bien besoin d’un mot plus spécifique pour désigner ces ensembles. 

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